| [article] 
					| Titre : | Actium ou la paix romaine |  
					| Type de document : | texte imprimé |  
					| Auteurs : | Maurice Sartre, Auteur |  
					| Année de publication : | 1992 |  
					| Article en page(s) : | p. 32 à 36 |  
					| Langues : | Français (fre) |  
					| Catégories : | Entités temporelles:Périodisations:Antiquité:Antiquité gréco-romaine:Antiquité romaine 
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					| Résumé : | 
 A Actium, le 2 septembre 31 av. J.-C, Octave a vaincu Antoine : l'Occident romain a vaincu l'Orient. La Méditerranée se trouve, pour la première fois, unifiée et pacifiée. Des colonnes d'Hercule au Bosphore et au delta du Nil, la « Pax romana » règne sans partage. Parce qu'elle a su associer les notables provinciaux à la gestion de l'Empire.
 
 Actium : un promontoire aride à l'entrée du golfe d'Ambracie sur la côte occidentale de la Grèce. Là s'élève un sanctuaire d'Apollon Aktios où les Acarnaniens avaient l'habitude de célébrer chaque année des concours en l'honneur du dieu. Depuis les guerres du IIe siècle av. J.-C. qui ont vu les armées romaines piller l'Épire et la Grèce de l'Ouest, l'endroit est peu fréquenté. Seule la position du cap, sur la route de l'Italie et de la Sicile, lui vaut d'être encore connu des marins qui relâchent, par mauvais temps, dans les eaux calmes du golfe.
 
 C'est là que le 2 septembre 31 av. J.-C. se livre la bataille décisive qui met fin aux guerres civiles à Rome et ouvre la voie à l'annexion du dernier royaume hellénistique, l'Egypte. Certes, l'histoire ne se joue pas en un jour : Actium n'est que l'aboutissement (avant la prise d'Alexandrie le 1er août de l'année suivante) d'une campagne où Marc Antoine, général romain qui, maître de l'Orient, avait fini, disait Octave, par faire siens les intérêts de l'Egypte, au détriment de ceux de l'Empire, a laissé passer sa chance. Si militairement tout est joué à Actium, politiquement tout reste à faire : après la victoire d'Octave qui tient l'Occident de l'Empire et affirme défendre l'unité des territoires romains, il fallut des années pour que se mette en place une nouvelle organisation politique. Instant privilégié d'un long processus, Actium symbolise, depuis l'Antiquité, le passage de la guerre à la paix, de la désunion à l'unification politique de toute la Méditerranée, la seule qu'elle ait jamais connue.
 
 Depuis la fin du IIIe siècle av. J.-C, Rome avait étendu son autorité à la fois sur l'ensemble de la péninsule italienne et sur les rivages de la Méditerranée. Cette extension, commencée en Occident par la conquête de la Sicile (241 av. J.-C), de la Sardaigne (236 av. J.-C.) et de l'Espagne (197 av. J.-C), s'est poursuivie conjointement dans les deux bassins de la Méditerranée. Elle s'est accélérée depuis le milieu du IIe siècle avant notre ère avec la création des provinces de Macédoine (148 av. J.-C), d'Afrique (146 av. J.-C), d'Asie (133-129 av. J.-C), et de Narbonnaise.
 
 Luttant à la fois contre les pirates qui infestent toute la Méditerranée et contre le roi du Pont, Mithridate VI Eupator, dont les entreprises mettent en péril la présence romaine en Asie et en Grèce [1], Rome ne cesse d'étendre son autorité et de créer de nouvelles provinces en Orient : Cilicie (vers 96 av. J.-C), Bithynie-Pont (74 av. J.-C), Syrie (64 av. J.-C), Chypre (59 av. J.-C). Ainsi disparaissent les royaumes dits « hellénistiques », hérités des conquêtes d'Alexandre le Grand (356-323 av. J.-C), et ceux qui s'étaient constitués sur leurs marges. Presque partout, Rome s'approprie l'espace en installant une administration provinciale réduite, chargée essentiellement de maintenir l'ordre et de faire rentrer l'impôt. Ainsi, lorsque Marc Antoine et Octave, associés à Lépide au sein du Second Triumvirat [2] (octobre 43 av. J.-C), s'érigent en vengeurs de César assassiné, la quasi-totalité des rivages de la Méditerranée obéit à Rome, à l'exception du royaume lagide, réduit à l'Egypte [3]. Actium ne marque donc que l'achèvement d'une conquête déjà réalisée pour l'essentiel.
 
 Cependant, dans les années 30 avant notre ère, cette hégémonie de Rome est encore répartie entre des maîtres rivaux. En octobre 42 av. J.-C, les triumvirs s'étaient partagé le monde : à Octave l'Occident, à Lépide l'Afrique, à Marc Antoine l'Orient, tandis que l'Italie restait le bien commun où chacun pourrait recruter des troupes. En 39 av. J.-C, il fallut faire une place à Sextus Pompée, le fils du « Grand Pompée » rival de César, qui reçut les îles (Sicile, Sardaigne, Corse) et l'Achaïe (au nord du Péloponnèse). Depuis lors, Octave était parvenu à reconstituer l'unité du bassin occidental en éliminant d'abord Lépide, puis Sextus Pompée (vaincu à Nauloque en 36 av. J.-C). On en revenait à un partage du monde entre deux imperatores dont la brouille, prévisible dès la fin 34 av. J.-C, devint évidente en février-mars 32 av. J.-C.
 |  in L'histoire > N° 157  (Juillet-Août 1992) . - p. 32 à 36
 [article] Actium ou la paix romaine [texte imprimé] / Maurice Sartre , Auteur . - 1992 . - p. 32 à 36.Langues  : Français (fre )in L'histoire  > N° 157  (Juillet-Août 1992)  . - p. 32 à 36 
					| Catégories : | Entités temporelles:Périodisations:Antiquité:Antiquité gréco-romaine:Antiquité romaine 
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					| Résumé : | 
 A Actium, le 2 septembre 31 av. J.-C, Octave a vaincu Antoine : l'Occident romain a vaincu l'Orient. La Méditerranée se trouve, pour la première fois, unifiée et pacifiée. Des colonnes d'Hercule au Bosphore et au delta du Nil, la « Pax romana » règne sans partage. Parce qu'elle a su associer les notables provinciaux à la gestion de l'Empire.
 
 Actium : un promontoire aride à l'entrée du golfe d'Ambracie sur la côte occidentale de la Grèce. Là s'élève un sanctuaire d'Apollon Aktios où les Acarnaniens avaient l'habitude de célébrer chaque année des concours en l'honneur du dieu. Depuis les guerres du IIe siècle av. J.-C. qui ont vu les armées romaines piller l'Épire et la Grèce de l'Ouest, l'endroit est peu fréquenté. Seule la position du cap, sur la route de l'Italie et de la Sicile, lui vaut d'être encore connu des marins qui relâchent, par mauvais temps, dans les eaux calmes du golfe.
 
 C'est là que le 2 septembre 31 av. J.-C. se livre la bataille décisive qui met fin aux guerres civiles à Rome et ouvre la voie à l'annexion du dernier royaume hellénistique, l'Egypte. Certes, l'histoire ne se joue pas en un jour : Actium n'est que l'aboutissement (avant la prise d'Alexandrie le 1er août de l'année suivante) d'une campagne où Marc Antoine, général romain qui, maître de l'Orient, avait fini, disait Octave, par faire siens les intérêts de l'Egypte, au détriment de ceux de l'Empire, a laissé passer sa chance. Si militairement tout est joué à Actium, politiquement tout reste à faire : après la victoire d'Octave qui tient l'Occident de l'Empire et affirme défendre l'unité des territoires romains, il fallut des années pour que se mette en place une nouvelle organisation politique. Instant privilégié d'un long processus, Actium symbolise, depuis l'Antiquité, le passage de la guerre à la paix, de la désunion à l'unification politique de toute la Méditerranée, la seule qu'elle ait jamais connue.
 
 Depuis la fin du IIIe siècle av. J.-C, Rome avait étendu son autorité à la fois sur l'ensemble de la péninsule italienne et sur les rivages de la Méditerranée. Cette extension, commencée en Occident par la conquête de la Sicile (241 av. J.-C), de la Sardaigne (236 av. J.-C.) et de l'Espagne (197 av. J.-C), s'est poursuivie conjointement dans les deux bassins de la Méditerranée. Elle s'est accélérée depuis le milieu du IIe siècle avant notre ère avec la création des provinces de Macédoine (148 av. J.-C), d'Afrique (146 av. J.-C), d'Asie (133-129 av. J.-C), et de Narbonnaise.
 
 Luttant à la fois contre les pirates qui infestent toute la Méditerranée et contre le roi du Pont, Mithridate VI Eupator, dont les entreprises mettent en péril la présence romaine en Asie et en Grèce [1], Rome ne cesse d'étendre son autorité et de créer de nouvelles provinces en Orient : Cilicie (vers 96 av. J.-C), Bithynie-Pont (74 av. J.-C), Syrie (64 av. J.-C), Chypre (59 av. J.-C). Ainsi disparaissent les royaumes dits « hellénistiques », hérités des conquêtes d'Alexandre le Grand (356-323 av. J.-C), et ceux qui s'étaient constitués sur leurs marges. Presque partout, Rome s'approprie l'espace en installant une administration provinciale réduite, chargée essentiellement de maintenir l'ordre et de faire rentrer l'impôt. Ainsi, lorsque Marc Antoine et Octave, associés à Lépide au sein du Second Triumvirat [2] (octobre 43 av. J.-C), s'érigent en vengeurs de César assassiné, la quasi-totalité des rivages de la Méditerranée obéit à Rome, à l'exception du royaume lagide, réduit à l'Egypte [3]. Actium ne marque donc que l'achèvement d'une conquête déjà réalisée pour l'essentiel.
 
 Cependant, dans les années 30 avant notre ère, cette hégémonie de Rome est encore répartie entre des maîtres rivaux. En octobre 42 av. J.-C, les triumvirs s'étaient partagé le monde : à Octave l'Occident, à Lépide l'Afrique, à Marc Antoine l'Orient, tandis que l'Italie restait le bien commun où chacun pourrait recruter des troupes. En 39 av. J.-C, il fallut faire une place à Sextus Pompée, le fils du « Grand Pompée » rival de César, qui reçut les îles (Sicile, Sardaigne, Corse) et l'Achaïe (au nord du Péloponnèse). Depuis lors, Octave était parvenu à reconstituer l'unité du bassin occidental en éliminant d'abord Lépide, puis Sextus Pompée (vaincu à Nauloque en 36 av. J.-C). On en revenait à un partage du monde entre deux imperatores dont la brouille, prévisible dès la fin 34 av. J.-C, devint évidente en février-mars 32 av. J.-C.
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